Affaire Full Tilt Poker: la crédibilité de l'ARJEL mise à rude épreuve
Si vous suivez un minimum l’actu poker, vous n’êtes certainement pas sans savoir que rien ne va plus du côté de chez Full Tilt Poker. En effet, depuis maintenant une semaine, la commission des jeux de l’île d’Aurigny (Alderney en Anglais), a suspendu sa licence d’opérateur de jeu en ligne au numéro 2 mondial du secteur, suite aux évènements liés au « Black Friday ». Dommage collatéral : le site français n’est plus non plus capable d’accueillir les joueurs.
En effet, le logiciel sur lequel les joueurs français évoluaient est dépendant de celui de la maison mère. Bon a priori, on pourrait croire qu’il ne s’agit que d’un problème technique vu que Full Tilt Poker est dûment agréé en France. Les joueurs ont donc pensé un temps qu’un déménagement de serveurs suffirait pour rétablir la situation en France.
Que nenni, le mal semble plus profond ! Pour preuve, les demandes de retraits approuvés avant la coupure n’ont toujours pas abouti. Les Français se retrouvent donc dans une situation similaire à celle des joueurs américains qui n’ont pas vu l’once d’un $ sur leur compte depuis plus de deux mois.
Justement à propos des joueurs US, on pouvait légitimement penser que les bankrolls des joueurs étaient déposés sur des comptes bancaires qui ont été bloqués par la justice américaine. En France, a priori, il n’y avait pas de craintes pour les bankrolls des joueurs, puisque le très sécurisant ARJEL avait toujours laissé penser que l’argent des joueurs était sur des comptes séparés sous surveillance. Enfin, c’est ce que les joueurs pensaient ! Dans le cahier des charges permettant d’obtenir un agrément ARJEL, l’autorité demande effectivement la preuve de l’ouverture d’un compte séparé dans l’UE où l’argent des bankrolls sera déposé. « Ah ça, c’est super ! ». Super, jusqu’au moment où les joueurs se sont rendus compte que l’ARJEL n’avait pas un œil systématique sur le fonctionnement de ce compte. Pour preuve, la semaine passée, l’ARJEL, qui sent que la situation devient délicate, demande les preuves de la capacité financière du fameux compte. On comprend alors que l’autorité a clairement misé sur la bonne foi des poker-rooms jusqu’ici !
Full Tilt Poker étant visiblement dans l’incapacité de fournir ces preuves financières, l’ARJEL a donc décidé de suspendre l’agrément à titre conservatoire, au moins jusqu’au réexamen du dossier.
Pendant un temps, selon des rumeurs, Full Tilt Poker semblait chercher refuge dans une réserve indienne pour pouvoir redémarrer ses serveurs. Puis, on a parlé d’investisseurs prêts à renflouer le numéro 2 mondial. Sans communication officielle de l’intéressé, difficile de savoir dans quelle situation se trouve réellement FTP.
Les joueurs français sont inquiets, très inquiets même ! Qu’il s’agisse de 20 ou de 50 000 €: tout le monde veut légitiment récupérer son argent. La question que tout le monde se pose maintenant, est : « Full Tilt Poker au bord de la faillite ? ».
La grogne chez les joueurs monte ! L’ARJEL est au moins autant dans le viseur que FTP. L’an passé, les joueurs se voyaient avancer tous les effets bénéfiques d’une régulation à la française. Un an plus tard, on semble tout proche de l’epic fail pour l’ARJEL. « Marre de vous faire plumer ? ». On a souvent ri de ces pubs, tout en sachant que les incidents de paiement sur les poker-rooms en .com étaient anecdotiques. Peut-être que l’ARJEL parlait du poker rigged sur les poker-rooms en .com, alors ? La grande majorité des opérateurs présents sur le marché sont des acteurs internationaux…
Reste la mission anti-addiction de l’ARJEL. Mouais, avec près de 30 poker-rooms sur le marché, il n’est pas bien compliqué pour un joueur addict d’ouvrir un compte sur chacune et de déposer à souhait. D’autant plus que le joueur décide lui-même du montant qu’il veut déposer et peut modifier ses limites de dépôt à volonté.
Personnellement, je ne crois pas avoir été dupe. L’objectif de l’Etat était clairement de taxer les joueurs pour faire grossir les recettes d'un pays dont les finances ne vont pas pour le mieux. Aujourd’hui, en cash-game, l’Etat ponctionne aux alentours de 35 % du montant du rake. Les poker-rooms ont accepté de se prêter au jeu des taxes, en échange, elles ont pu communiquer librement sur les grands médias nationaux pour attirer le chaland. Donnant, donnant !
L’ARJEL se remettra-t-il en cause dans sa mauvaise gestion du dossier FTP et la faillite de sa mission suposée de sécurisation des fonds ? Va-t-il chercher à récupérer à tout prix l’argent des joueurs ou bien donner une fin de non-recevoir aux joueurs furieux ? Les joueurs seront-ils remboursés par l'Etat en cas de faillite de FTP ? Est-ce que ce cas créera un précédent qui permettra de faire évoluer la législation dans le sens des joueurs ? Autant de questions qui sont pour le moment sans réponses. A suivre !